Allocations familiales : la Cours de Justice de l’Union Européenne saisie du dossier


Par jugement du 17 novembre 2017, le Conseil Arbitral de la Sécurité Sociale de Luxembourg a décidé que le fait de ne pas verser les allocations familiales aux enfants non biologiques à charge du travailleur frontalier constituait une discrimination en fonction de la résidence.

Pour décider ainsi, le juge a constaté que les mêmes enfants résidant au Luxembourg avaient droit aux allocations familiales du fait qu’ils résidaient au pays.

Pour mémoire, par une loi du 23 juillet 2016 entrée en vigueur le 1er août 2016, le Luxembourg avait revu sa définition de la famille, excluant désormais de celle-ci les enfants du conjoint ou du partenaire, qu’il reconnaissait pourtant jusqu’alors.

Résultat : dans le cadre des familles recomposées qui sont pléthore aujourd’hui, les enfants du conjoint ou du partenaire du travailleur frontalier ne travaillant pas au Luxembourg se sont vu supprimer du jour au lendemain les allocations familiales.

De prime abord, et selon ladite loi, la règle est la même pour les enfants placés dans une situation identique et vivant au Luxembourg. Tout le monde serait logé à la même enseigne.

Mais la réalité est toute autre : il s’avère que les enfants résidant au Luxembourg ont de ce fait un droit ouvert aux allocations familiales ensemble avec le fait que leur parent ne travaillant pas y travaille également.

En conséquence, il s’avère que seuls les enfants ne résidant pas au Luxembourg, quand bien même ils sont à charge du travailleur frontalier qui vit avec leur parent, sont les victimes de la nouvelle loi luxembourgeoise.

Seuls les frontaliers étaient donc visés !!!

 

 

Après les bourses d’étude, les allocations familiales !!!

La Caisse pour l’Avenir des Enfants a fait appel de la décision du Conseil Arbitral des Assurances Sociales du 17 novembre 2017.

Cet appel a été plaidé devant le Conseil Supérieur de la Sécurité Sociale le 19 novembre 2018.

Par décision du 17 décembre 2018, la juridiction d’appel a décidé avant de se prononcer définitivement de saisir la Cour de Justice de l’Union Européenne en lui posant une question préjudicielle portant sur les trois points suivants :

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« L’allocation familiale luxembourgeoise octroyée selon les articles 269 et 270 du code de la sécurité sociale doit-elle être assimilée à un avantage social au sens de l ‘article 45 TFUE et de l’article 7 paragraphe 2 du règlement 49212011 relatif à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de l ‘Union ?

 

En cas d’assimilation, la définition de membre de la famille applicable en vertu de l ‘article premier i du règlement 88312004 s’oppose à la définition plus élargie de membre de la famille de l ‘article 2, point 2) de la directive 2004138/CE du parlement européen et du Conseil alors que cette dernière exclut toute autonomie de l ‘Etat membre dans la définition de membre de la famille contrairement à ce qui est consacré par le règlement de coordination et exclut à titre subsidiaire toute notion de charge principale. La définition de membre de la famille au sens de l ‘article 1er, i, du règlement 883/2004 doitelle dès lors prévaloir au vu de sa spécificité  dans le contexte  d’une coordination des régimes de sécurité  sociale  et surtout l ‘Etat membre gardetil compétence pour définir les membres de la famille qui ouvrent droit à l ‘allocation familiale  ?

 

En cas d’application de l ‘article 2, point 2) de la directive 2004138/ CE du Parlement européen et du Conseil aux prestations familiales et plus précisément  à l ‘allocation familiale luxembourgeoise, l ‘exclusion de l’enfant du conjoint de la définition du membre de la famille peut-elle être considérée comme une discrimination indirecte justifiée au vue de l ‘objectif national de l’Etat membre de consacrer le droit personnel de l enfant et de la nécessité de protéger l administration de l’Etat membre d ’emploi alors que l’élargissement du champ personnel d’application constitue une charge déraisonnable pour le système de prestations familiales luxembourgeois qui exporte notamment presque  48%  de  ses  prestations familiales  ? »

 

La Cour de Justice de l’Union Européenne est donc saisie du dossier.

Elle devrait rendre une décision en répondant à ces questions d’ici plus ou moins un an.

La juridiction luxembourgeoise devra ensuite se conformer à la décision qui sera rendue par le juge communautaire.

Le combat continue.

Les frontaliers concernés peuvent faire un recours si elles le souhaitent et se joindre aux nombreux parents et enfants concernés, qui ont décidé de ne pas subir la situation et de faire valoir leurs droits.

Comme pour les bourses, en cas de victoire en appel, seules les personnes qui auront introduit un recours pourront prétendre au paiement des allocations familiales pour le passé, d’autant qu’une prescription d’un an s’applique en la matière.

Pour plus de renseignements, contacter l’Association des Frontaliers au Luxembourg au 03 82 53 71 12 – www.frontalux.eu